Michaël Séguin, v.p. aux relations intersyndicales
Nos collègues tuteurs et tutrices de la TÉLUQ sont au cœur de l’accompagnement des étudiantes et des étudiants depuis la fondation de cette université en 1972. Dans une université offrant des formations exclusivement à distance à une majorité d’étudiantes et d’étudiants de première génération, l’on ne saurait sous-estimer l’importance de ces encadrants et encadrantes disponibles pour répondre aux questions, évaluer et encourager (sur leur rôle, voir cette vidéo). La Télé-Université ne semble toutefois pas de cet avis : en recourant à la sous-traitance d’un institut privé et à la création d’un nouveau groupe d’enseignants, il semble que la direction se soit engagée dans la suppression pure et simple de la fonction de tuteur.
Voici les faits en bref : en 2016, la Télé-université donnait en sous-traitance à l’Institut Matci, un établissement privé ayant sise à Casablanca, Maroc, l’enseignement de ses cours de langue, retirant par le fait même aux tuteurs et tutrices l’encadrement d’environ 37 % des étudiants. En 2017, la direction créait, à même l’accréditation du Syndicat des professeurs de la TELUQ, un statut de professeurs contractuels, professeurs qui assureront à compter de janvier 75 % de l’encadrement des étudiants à raison du tiers du temps jusqu’ici alloué aux tuteurs et tutrice (1 h par étudiant plutôt que trois). À moins que les tribunaux ne leur donnent raison ou que la direction ne change d’avis, c’est la mise à pied qui attend la majorité des tuteurs en janvier prochain.
Au-delà de la perte d’emploi d’une centaine d’enseignants et d’enseignantes hautement qualifiés, les choix de la TÉLUQ sont préoccupants à un triple chef pour l’ensemble des chargés de cours du Québec :
1) Il montre la fragilité de nos conventions collectives pour lutter contre la privatisation de l’enseignement : si un institut marocain reconnu par le ministère de l’Enseignement supérieur peut offrir des cours de langues pour moins chers à la TÉLUQ, il y a potentiellement péril en la demeure pour l’ensemble des Écoles de langue universitaires.
2) Il montre la facilité avec laquelle des syndicats de professeurs peuvent venir grignoter nos accréditations syndicales : si les profs de la TELUQ ont pu s’entendre derrière des portes closes avec l’employeur sur le sort de leurs collègues tuteurs, cela illustre combien les tuteurs et tutrices (et par extension les chargés-es de cours) demeurent du personnel jetable, même lorsqu’ils sont établis depuis des années. Nul doute que cet enjeu doit éclairer la réflexion des chargées et chargés de cours de l’Université de Montréal sur leur propre situation et sur les diverses formes que prend leur précarité.
3) Il montre le danger d’un employeur déterminé à se débarrasser d’un syndicat fort : bien que les relations avec l’UdeM soient actuellement relativement cordiales après la signature de notre convention collective en octobre, les autres syndicats de l’université subissent de multiples vexations, notamment en lien avec l’exercice de leurs droits syndicaux. Il importe donc demeurer aux aguets.
Pour de plus amples informations sur la situation des tuteurs et tutrices, voir :