Enjeux de l’éducation supérieure au Québec (FNEEQ)

Vers un dialogue national professeurs/chargés de cours ? Nouvelles du conseil fédéral de la FNEEQ

Se tenait le 7 et le 8 septembre dernier le conseil fédéral de la FNEEQ, événement rassemblant autour de 200 délégués issus des trois regroupements de la fédération (université, cégep et privé). Le SCCCUM y a envoyé une délégation officielle constituée de huit membres votant[1] pour prendre part aux délibérations entourant principalement la suite des États généraux sur l’enseignement supérieur, les suites à donner au congrès de la CSN et le calendrier législatif pour l’automne.

Les États généraux de l’éducation supérieure : ça se poursuit !

Avaient lieu, en mai dernier à l’Université Laval, des États généraux rassemblant 500 personnes d’une vingtaine de fédérations syndicales et étudiantes. Le but de l’activité était de faire converger cette diversité d’acteurs du monde de l’éducation autour de revendications communes à la veille des élections provinciales de l’automne 2018. La première partie de ce programme ambitieux a été atteinte, soit faire converger ces groupes en un même lieu et les amener à s’écouter les uns les autres. Le vidéo suivant donne une idée de la teneur des débats : https://vimeo.com/223195480.

Le comité organisateur s’est rencontré en juin pour faire le suivi de l’événement et prévoir sa prochaine édition en mai 2017. Face à l’enthousiasme qu’il suscité, en particulier par nos collègues des cégeps, le conseil fédéral a accepté de poursuivre la démarche des ÉGES en adoptant la proposition suivante :

Considérant le succès du premier rendez-vous des partenaires dans le cadre des États généraux en enseignement supérieur et les pistes d’action énoncées lors de la plénière du 20 mai ;

Considérant qu’il nous reste des objectifs à atteindre dans le cadre des ÉGES ;

Considérant la volonté du collectif de poursuivre le travail pour dégager des revendications communes en enseignement supérieur ;

Considérant qu’il faut assurer une participation du plus grand nombre ;

Considérant l’intérêt de certains conseils centraux de s’inscrire dans la démarche ;

Considérant les préoccupations des régions sur l’avenir de l’enseignement supérieur ;

Il est proposé :

  1. Que la FNEEQ poursuive le travail autour des ÉGES en préparant un deuxième rendez-vous des partenaires en enseignement supérieur au printemps 2018.
  2. Que ce deuxième rendez-vous soit précédé de rencontres régionales à l’automne 2017 et à l’hiver 2018.
  3. Que le bureau fédéral soit périodiquement informé de l’avancement de la démarche et qu’il prenne les décisions nécessaires à la réalisation de ces événements.
  4. Que le comité école et société appuie le comité exécutif dans la poursuite des ÉGES.

Nous vous tiendrons donc au courant dans les semaines qui viennent des suites qui s’annoncent, notamment de la forme que prendra l’idée en cours de discussion d’une tournée régionale sur les thèmes de la précarité, de la marchandisation et du financement équitable.

Cela dit, un point sur lequel plusieurs délégués chargés de cours de l’UQAM et de l’UdeM sont abondamment revenus lors de la discussion à propos de la suite des ÉGES est celui du rapport entre professeurs et chargés de cours. En effet, pour plusieurs personnes extérieures au milieu universitaire, les chargés de cours apparaissent souvent comme des « casseux de party » qui empêchent l’atteinte de consensus parce qu’ils sont pris dans des revendications qui relèvent des conditions de travail. Nous avons donc fait valoir que nous désirions atteindre des consensus autant que les autres, mais que nous refusions de prendre part à des consensus qui visent, à terme, à nous exclure. Par exemple, si lutter contre les dérives autoritaires exige de se ranger aveuglément derrière des professeurs qui refusent de nous donner voix au chapitre, nous refusons. Ou encore, si revoir la formule de financement des universités signifie de le faire exclusivement au bénéfice des professeurs sans que notre contribution ne soit prise en compte, nous refusons.

En bref, les chargés de cours présents ont insisté pour que soit entreprise une démarche qui permette de nous parler, entre enseignants universitaires, comme en avaient fait la proposition en mai Christian Nadeau et Jean Portugais. Reprenant cette discussion entre syndicats de chargés de cours le 21 et le 22 octobre dernier, nous en sommes arrivés à nous dire que la première étape était d’abord d’entreprendre des contacts locaux avec les syndicats de professeurs de chacune de nos universités pour voir jusqu’où il était possible de dégager des consensus réels. On le devine : la crainte d’être instrumentalisés par les profs n’est jamais loin. Dossier à suivre.

Le point sur le menu législatif

Le calendrier législatif en éducation supérieure sera chargé cet automne et nous l’avons entendu à plus d’un endroit. Y figurera notamment :

Lors du Regroupement université du 21 et 22 septembre, la question de la création d’un Conseil des universités qui constituerait une nouvelle couche gestionnaire chargée de mettre en œuvre une logique d’assurance-qualité a suscité beaucoup d’inquiétude, surtout que le rapport Corbo n’incluait la présence d’aucun chargé de cours dans sa recommandation sur la composition dudit Conseil. Idem pour la question de la révision du modèle de financement dans la mesure où, s’il est clair qu’un financement en fonction du nombre d’étudiants (par « tête de pipe ») encourage la compétition entre les universités, reste à voir ce que sera la nouvelle formule. Nous vous reviendrons plus en détail sur chacun de ces éléments au fur et à mesure où nous en apprenons davantage.

Un DG à la CSN ?

Si le congrès de la CSN était un grand happening (voir mon article https://scccum.ca/voir-loin-viser-scccum-congres-de-csn/), le mécontentement d’un nombre de plus en plus grand de syndicats se fait graduellement entendre… enfin dans le milieu de l’éducation plutôt reconnu pour son sens critique. Pourquoi ? D’une part, il semble que le congrès soit chorégraphié de manière à ce qu’il n’y ait pas vraiment l’espace pour remettre en cause les propositions sur la table, plusieurs congressistes s’exaspérant de voir les débats durer plutôt que de les concevoir comme un exercice de démocratie. D’autre part, il semble aussi que cette grand-messe syndicale soit de moins en moins le rassemblement des syndicats locaux et de plus en plus un échange polyphonique entre les dirigeants de la CSN et ceux des fédérations qui la composent. À preuve, ce sont surtout eux qui ont monopolisé l’attention. Il a été suggéré qu’il y aurait peut-être lieu de revoir en partie le mode de fonctionnement du congrès, entre autres en favorisant davantage de travail en atelier plutôt qu’en plénières à 1000 personnes.

Un autre enjeu qui soulève la grogne de certains depuis quelques semaines est la création, une semaine après la fin du congrès, d’un poste de directeur général à la CSN. Pour plusieurs militants, créer ce nouveau poste alors que 25 autres venaient d’être coupés dans le cadre de la proposition budgétaire adoptée relevait non seulement de l’indécence, mais d’un virage managérial inquiétant. Le président de la CSN, Jacques Létourneau, a d’ailleurs essuyé de vives critiques suite à son allocution lors de l’ouverture du conseil fédéral de la FNEEQ. Il a toutefois défendu sa décision en expliquant que le nouveau poste n’était pas vraiment nouveau, qu’il s’agissait de la transformation d’un poste d’adjoint politique en poste de directeur général avec un salaire 3 % plus élevé. Tempête dans un verre d’eau ? À suivre…

[1] Y étaient en tant que délégués officiels Stéphane Fauteux, Bertrand Hounkannounon, Françoise Guay, Florence Lebeau, Ekaterina Piskunova, Benoit Robichaud, Michaël Séguin et Pierre G. Verge. Frédéric Kantorowski y était en tant que membre du bureau fédéral et Sovi Ngau comme délégué fraternel.

 

Michaël Séguin, VP aux relations intersyndicales, SCCCUM