Négociations dans le secteur public: en attente d’un règlement global

Des ententes sectorielles suspendues à un règlement global !

Les mobilisations dans le secteur public et parapublic des travailleuses et travailleurs membres des syndicats regroupés dans le Front commun (plus de 400 000 travailleuses et travailleurs sur les 577 000 concernés par ces négociations) ont atteint un sommet historique le 9 décembre dernier, jour de grève nationale. Depuis début décembre, le gouvernement Couillard débloque les mandats donnés aux tables sectorielles, qui discutent des conditions de travail – les retraites et les salaires étant discutés à la table centrale, avec le Conseil du trésor présidé par Martin Coiteux.

Plusieurs ententes sectorielles de principe ont du coup été conclues, notamment pour les infirmières et le personnel de la santé (avec la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec ou FIQ et la Fédération de la santé et des services sociaux, FSSS-CSN) ainsi que pour les personnels des cégeps (enseignants et personnel de soutien, avec la FNEEQ-CSN et la Fédération des employées et employés de services publics, FEESP-CSN). Ces secteurs figurent parmi les locomotives, réelles ou symboliques, de ces mobilisations. Changement de rang salarial, équité salariale et aussi augmentation du nombre d’emplois permanents … Ces ententes sont loin du recul initial prévu par le gouvernement et sont d’autant plus pertinentes quand on a en tête que 35% du secteur public gagne moins que 25 000$ par an à cause de la précarité des conditions de travail.

Cependant, les négociations et les mobilisations ne sont pas terminées. D’une part, à la demande des syndicats locaux qui reflètent ainsi la mobilisation des membres, plusieurs ententes sectorielles ont été « déposées ». C’est-à-dire qu’elles ne seront pas étudiées indépendamment de la proposition sur les salaires et les retraites qui seront faites à la table centrale. Pas question d’accepter une entente au rabais, le message est clair.

D’autre part, plusieurs de ces syndicats veulent continuer la lutte contre l’austérité, qui ne va pas s’arrêter avec les négociations du secteur public. Certains auraient d’ailleurs souhaité que les revendications relient plus les deux sujets au lieu de rester dans le cadre des conventions collectives. Pourquoi en effet ne pas renouer avec des revendications plus sociales, comme le mettaient de l’avant les syndicats dans les années 70, et demander un budget anti-austérité global dans l’éducation et la santé ? Et pourquoi ne pas mettre de l’avant parallèlement des augmentations uniformes, comme lorsque les centrales syndicales s’étaient mises d’accord pour réclamer (en 1972) un minimum de 100 dollars la semaine, favorisant la remontée des bas salaires (alors que les augmentations en pourcentage, telles que réclamées actuellement favorisent plus les hauts salaires) ?

Enfin, la dernière raison pour lesquelles les mobilisations ne vont sans doute pas s’arrêter, c’est que depuis le printemps et cet automne, lors des grèves régionales et des multiples actions de perturbations économiques et sociales qui se sont déroulées , des solidarités se sont tissées entre les syndicats locaux des divers secteurs d’activité (entre l’éducation et la santé notamment), les uns venant encourager les autres tenus à 43 minutes de grève maximum par jour (à cause des services essentiels en santé). Elles poussent les centrales syndicales à rester dans une démarche unitaire face au gouvernement. Parallèlement, des solidarités se sont aussi consolidées avec le communautaire, qui a fait une grève symbolique les 2 et 3 novembre dernier, et avec les associations étudiantes. Des organismes intersyndicaux et populaires, rassemblant les uns et les autres, se sont déployés dans les quartiers ou dans les régions.

Ces réseaux de solidarité trouvent sans doute leur inspiration dans les contestations à la loi spéciale contre le mouvement étudiant en 2012, lorsque les habitants avaient spontanément organisé des manifestations de casseroles. En tout cas, la lutte contre l’austérité est en train de réunir à nouveau, au-delà des cadres institutionnels établis, les travailleurs et les luttes populaires, communautaires et étudiantes, tout en entraînant des structures syndicales à se montrer plus combatives et attentives comme le font la FNEEQ et le Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM-CSN qui réunit les différents syndicats affiliés à la CSN sur Montréal). Et ces solidarités montantes indiquent que les personnes mobilisées verraient mal que l’on termine les négociations actuelles sans s’occuper des mesures ou projets du gouvernement concernant l’aide sociale, le communautaire, etc. La grève sociale, cette perspective lancée pour s’opposer aux politiques néolibérales par le communautaire et la Coalition Main Rouge (contre la tarification et la privatisation des services publics, qui est devenue de facto une coalition contre l’austérité), est toujours d’actualité.

Pour en savoir plus

  • Martin Coiteux a ainsi été empêché trois fois de suite de faire ses discours devant des institutions économiques et d’affaires. Voir par exemple ce qui s’est passé le 11 décembre à Montréal
  • Voir l’article intitulé Tout ce que nous avons accompli dans le Huffinghton Post
  • Sur les politiques néolibérales en éducation, ou austéritaires, voir l’article de Diane Lamoureux, professeure en sciences politiques à l’Université Laval, qui vient de paraître dans le journal des profs contre l’austérité .

 

 

 

Négociations dans le secteur public: en attente d'un règlement global

Des ententes sectorielles suspendues à un règlement global !

Les mobilisations dans le secteur public et parapublic des travailleuses et travailleurs membres des syndicats regroupés dans le Front commun (plus de 400 000 travailleuses et travailleurs sur les 577 000 concernés par ces négociations) ont atteint un sommet historique le 9 décembre dernier, jour de grève nationale. Depuis début décembre, le gouvernement Couillard débloque les mandats donnés aux tables sectorielles, qui discutent des conditions de travail – les retraites et les salaires étant discutés à la table centrale, avec le Conseil du trésor présidé par Martin Coiteux.

Plusieurs ententes sectorielles de principe ont du coup été conclues, notamment pour les infirmières et le personnel de la santé (avec la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec ou FIQ et la Fédération de la santé et des services sociaux, FSSS-CSN) ainsi que pour les personnels des cégeps (enseignants et personnel de soutien, avec la FNEEQ-CSN et la Fédération des employées et employés de services publics, FEESP-CSN). Ces secteurs figurent parmi les locomotives, réelles ou symboliques, de ces mobilisations. Changement de rang salarial, équité salariale et aussi augmentation du nombre d’emplois permanents … Ces ententes sont loin du recul initial prévu par le gouvernement et sont d’autant plus pertinentes quand on a en tête que 35% du secteur public gagne moins que 25 000$ par an à cause de la précarité des conditions de travail.

Cependant, les négociations et les mobilisations ne sont pas terminées. D’une part, à la demande des syndicats locaux qui reflètent ainsi la mobilisation des membres, plusieurs ententes sectorielles ont été « déposées ». C’est-à-dire qu’elles ne seront pas étudiées indépendamment de la proposition sur les salaires et les retraites qui seront faites à la table centrale. Pas question d’accepter une entente au rabais, le message est clair.

D’autre part, plusieurs de ces syndicats veulent continuer la lutte contre l’austérité, qui ne va pas s’arrêter avec les négociations du secteur public. Certains auraient d’ailleurs souhaité que les revendications relient plus les deux sujets au lieu de rester dans le cadre des conventions collectives. Pourquoi en effet ne pas renouer avec des revendications plus sociales, comme le mettaient de l’avant les syndicats dans les années 70, et demander un budget anti-austérité global dans l’éducation et la santé ? Et pourquoi ne pas mettre de l’avant parallèlement des augmentations uniformes, comme lorsque les centrales syndicales s’étaient mises d’accord pour réclamer (en 1972) un minimum de 100 dollars la semaine, favorisant la remontée des bas salaires (alors que les augmentations en pourcentage, telles que réclamées actuellement favorisent plus les hauts salaires) ?

Enfin, la dernière raison pour lesquelles les mobilisations ne vont sans doute pas s’arrêter, c’est que depuis le printemps et cet automne, lors des grèves régionales et des multiples actions de perturbations économiques et sociales qui se sont déroulées , des solidarités se sont tissées entre les syndicats locaux des divers secteurs d’activité (entre l’éducation et la santé notamment), les uns venant encourager les autres tenus à 43 minutes de grève maximum par jour (à cause des services essentiels en santé). Elles poussent les centrales syndicales à rester dans une démarche unitaire face au gouvernement. Parallèlement, des solidarités se sont aussi consolidées avec le communautaire, qui a fait une grève symbolique les 2 et 3 novembre dernier, et avec les associations étudiantes. Des organismes intersyndicaux et populaires, rassemblant les uns et les autres, se sont déployés dans les quartiers ou dans les régions.

Ces réseaux de solidarité trouvent sans doute leur inspiration dans les contestations à la loi spéciale contre le mouvement étudiant en 2012, lorsque les habitants avaient spontanément organisé des manifestations de casseroles. En tout cas, la lutte contre l’austérité est en train de réunir à nouveau, au-delà des cadres institutionnels établis, les travailleurs et les luttes populaires, communautaires et étudiantes, tout en entraînant des structures syndicales à se montrer plus combatives et attentives comme le font la FNEEQ et le Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM-CSN qui réunit les différents syndicats affiliés à la CSN sur Montréal). Et ces solidarités montantes indiquent que les personnes mobilisées verraient mal que l’on termine les négociations actuelles sans s’occuper des mesures ou projets du gouvernement concernant l’aide sociale, le communautaire, etc. La grève sociale, cette perspective lancée pour s’opposer aux politiques néolibérales par le communautaire et la Coalition Main Rouge (contre la tarification et la privatisation des services publics, qui est devenue de facto une coalition contre l’austérité), est toujours d’actualité.

Pour en savoir plus

  • Martin Coiteux a ainsi été empêché trois fois de suite de faire ses discours devant des institutions économiques et d’affaires. Voir par exemple ce qui s’est passé le 11 décembre à Montréal
  • Voir l’article intitulé Tout ce que nous avons accompli dans le Huffinghton Post
  • Sur les politiques néolibérales en éducation, ou austéritaires, voir l’article de Diane Lamoureux, professeure en sciences politiques à l’Université Laval, qui vient de paraître dans le journal des profs contre l’austérité .