L’UPop, à la source de la mission universitaire

Par Françoise Miquet

Depuis 2010, en dehors des institutions, dans des bars ou des lieux communautaires, l’UPop propose des cours gratuits, accessibles à toutes et à tous, sur une diversité de sujets qui stimulent la réflexion et la pensée critique.

Créée en 2010, UPop Montréal, inspirée du mouvement alternatif des universités populaires européennes, est un organisme à but non lucratif « qui a pour mission de favoriser le développement de l’esprit critique en offrant à la population de Montréal et des environs un accès libre et gratuit au savoir par le biais d’activités d’éducation populaire implantées dans plusieurs quartiers de la ville », qui « vise à créer un lieu dynamique de rencontre, de réflexion et de partage des connaissances » pour « joindre un large public intéressé par la culture et le savoir »  et « favoriser le sentiment d’appartenance à une communauté et l’envie de prendre part activement à la société québécoise ».

En bref, une initiative qui nous ramène à la base de la mission universitaire. Chaque série de cours se donne dans un café, un bar ou encore une librairie. Pas d’inscription, pas de droits de scolarité : on s’y rend, tout simplement.

Des sujets variés, des enseignants de tous horizons

Réflexion critique oblige, les sujets touchant la politique et la société ont la part belle à l’UPop : démystification de l’économie – et de l’économie néolibérale –, critique informée de l’austérité et du démantèlement des services publics avec présentation de solutions alternatives, cours sur l’empire de la finance, les paradis fiscaux et notamment le rôle du Canada à titre de « législation de complaisance », examen du système juridique québécois…

La sexualité n’est pas en reste : l’histoire de l’homosexualité en Occident, le désir, le mouvement queer et la déconstruction du genre, la perspective trans ont fait l’objet de cours. Ni l’écologie, qu’il s’agisse d’envisager la vie sans pétrole ou d’examiner la problématique de la destruction des océans, entre autres sujets ; ou les sciences dites « naturelles », avec des cours sur l’homme neuronal, l’astrophysique ou l’histoire de l’évolution… qui évolue. Sans oublier la zoologie, la psychologie, l’éthique animale, la philosophie… ou encore une série sur les tenants et aboutissants politiques et sociétaux du mythe de Saint-Germain-des-Prés.

L’UPop a aussi abordé la littérature, d’une série intitulée « Ces livres qui ne vous laissent pas intact » à celle sur la BD (« la grande culture des p’tits bonshommes »). Elle propose un club de lecture.

Au sein de la riche programmation de l’hiver 2016, la série « Deux inclassables du XXe siècle : Walter Benjamin et Henri Laborit » a attiré de nombreux participants au café l’Auditoire de Radio centre-ville. Et il est encore temps de se joindre au cours « Le Québec et les autochtones : une histoire singulière », dont trois séances sont encore à venir, à la librairie Zone libre.

Des chargés de cours à l’UPop : pourquoi pas vous ?

Parmi les « animateurs » des séances, qui proviennent de divers groupes de la société, on reconnaît les noms de plusieurs chargés de cours, mais aussi d’employés à la recherche universitaire ou de doctorants, ou encore du journaliste scientifique du Forum de l’UdeM : cette mission citoyenne attire des membres de l’institution.

Toute personne intéressée peut suggérer un sujet ou encore proposer un cours au comité de sélection. Pourquoi pas vous ? Non seulement participer à l’UPop est une expérience enrichissante en soi, notamment en raison de la grande diversité des participants et des discussions qui sont la raison d’être de l’initiative. De plus, puisque les participants « font » également le cours, cela ne peut manquer d’enrichir un cours que vous donnez déjà, ou vous permettre de mettre à l’épreuve du débat public des idées que vous souhaiteriez intégrer à un cours.

Caractéristique de la mission de l’UPop : la fiche de proposition d’un cours comporte un espace sur les pistes d’actions que l’on pense donner aux participants, le cas échéant.

Un salutaire rappel historique

À l’occasion de son cinquième anniversaire, l’UPop fait le point sur ses origines en publiant un intéressant article qui relate la naissance (en 1899), la récupération et la renaissance des universités populaires. En voici une citation :

« Cette élaboration critique du savoir dans les universités populaires serait un crachat lancé à la face du conservatisme actuel de l’enseignement supérieur, qui cherche à tout prix à empêcher l’énonciation du conflit social par un enseignement ultraspécialisé, inoffensif, hors-sol, excluant tous rapports sociaux et toute visée critique au nom de la sacro-sainte objectivité. L’autonomie des universités et l’entrée « partenariale » du monde de l’entreprise témoignent de cette volonté de façonner un Homo capitalicus, selon les besoins, les souhaits et les attentes du Capital. À l’envers de ce modèle, l’université populaire mène un exercice de déconstruction des savoirs morts, mais dote surtout ses membres de savoirs pratiques qui leur donnent la « puissance d’agir » […]. »[1]

Pour en savoir plus sur UPop Montréal ou pour participer à ses activités : http://www.upopmontreal.com/

[1]Thomas Moreau, « L’université populaire doit l’être vraiment », http://www.revue-ballast.fr/luniversite-populaire/