Une loi-cadre pour concilier famille-travail-études

Par Carole Yerochewski

Qu’ont en commun les proches-aidants (qui prennent soin d’un parent âgé, par exemple), les étudiants et travailleurs qui ont des enfants ? Ils et surtout elles, d’ailleurs, jonglent avec des horaires parfois imprévisibles pour arriver à mener de front travail, études et soins aux enfants ou aux proches, et s’y épuisent souvent. Dans certains secteurs d’activités, comme le commerce et les services aux personnes (hôtellerie-restauration, aide à domicile), les horaires sont atypiques, souvent tôt le matin ou tard le soir, et les variations dans l’achalandage sont souvent reportées sur les employés par les employeurs, qui les préviennent la veille pour le lendemain d’un changement d’horaire. Les proches-aidants, à 75% des femmes, sont parfois obligés de démissionner de leur emploi pour accompagner le parent âgé ou le conjoint, et se retrouvent à la retraite pauvres et épuisées. Quant aux étudiants et surtout étudiantes (elles forment 70% des parents-étudiants), ils sont de plus en plus nombreux (25 % de la population étudiante dans le réseau de l’UQ, 40% dans certains domaines à l’Université Laval) mais les horaires de garderies ne collent pas toujours et quasiment aucune mesure dans les règlements des études n’encadrent cette situation.

Dans une conférence de presse qui s’est tenue dimanche 14 février, jour de la St-Valentin « parce qu’il faut beaucoup d’amour » pour arriver à vivre ces situations difficiles, les principales centrales syndicales québécoises[i] et des organismes communautaires bien placés dans ce domaine[ii] ont rendu publique la plateforme politique sur laquelle ils ont travaillé depuis deux ans pour aboutir à réclamer une loi-cadre pour la conciliation famille-travail-études. Car c’est aux milieux de travail et aux études de faire des efforts pour s’adapter à la situation des parents et des travailleurs ou étudiants.

Parmi les principales solutions promues par la loi-cadre réclamée, il faut relever : le droit de connaitre son horaire de travail à l’avance – ceci fait l’objet déjà de législations contraignantes dans d’autres pays, notamment en Europe, où les employeurs sont tenus de prévenir de changements de la grille horaire au moins une semaine à l’avance ; le droit de refuser de faire des heures supplémentaires; l’amélioration des congés pour obligations parentales ou familiales – les milieux non syndiqués ne sont en général pas couverts par des règlements le prévoyant ; l’augmentation du nombre de congés annuels; l’amélioration du congé parental et du congé pour naissance et adoption; enfin, la rémunération des congés maladie – rappelons, en effet, que pour les salariés non syndiqués qui ne sont couverts que par les normes, par définition minimales, du travail, ou pour d’autres, syndiqués dont la convention collective ne le prévoit pas, et pour tous les travailleurs et travailleuses autonomes, la maladie est une hantise, car si les soins de santé sont assurés, le revenu de remplacement n’est pas prévu.

Cette nouvelle campagne politique démarre alors que les négociations sur les conventions collectives sont entamées pour les chargés de cours à l’UdeM et à l’UQAM et qu’en la matière, il y aurait des progrès à faire : les horaires de cours sont parfois incompatibles avec les horaires de garderie mais le fait d’accommoder des chargés de cours ayant des enfants en bas âge n’est pas actuellement encadré. À suivre donc, ici et sur le site de la coalition (www.ccfte.wordpress.com)

[i] Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), Centrale des syndicats démocratiques (CSD), Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Confédération des syndicats nationaux (CSN), Fédération autonome de l’enseignement (FAE), Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ), Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)

[ii] Au bas de l’échelle, Conseil d’intervention pour l’accès des femmes au travail (CIAFT), Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec, Regroupement des aidantes et aidants naturels de Montréal, Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec, etc.