Négociation du Syndicat des tuteurs et tutrices de la Télé-université (STTTU)

Une restructuration qui pourrait provoquer la mise à pied de plusieurs tuteurs et tutrices puisque la majorité des tâches jusqu’ici effectuées par eux sont ou seront transférées à des sous-traitants (professeurs sous-contrats et établissements privés d’enseignement). La direction de la TÉLUQ semble mettre de côté à la fois la qualité de l’enseignement supérieur et les normes minimales de respect de ses employé-es au nom de l’impératif de compétition sur le marché de l’enseignement universitaire. La lutte que mène le STTTU est une lutte contre un virage vers la sous-traitance de l’enseignement, la précarisation et la désyndicalisation des emplois ainsi que la diminution du service aux étudiantes et aux étudiants.

Qui sont les tuteurs et les tutrices ?

La TÉLUQ est une composante du réseau de l’Université du Québec qui offre, depuis 40 ans, des programmes et cours universitaires entièrement à distance. Les professeurs développent les cours en ligne, aidés par un important service techno-pédagogique. Une fois le matériel de cours mis en ligne, dans la très grande majorité des cas, les étudiant-es n’auront un contact pédagogique qu’avec les tuteurs et les tutrices. Ce sont eux qui font l’enseignement comme tel, depuis 40 ans, pour 90 % des étudiant-es au 1er cycle, par un encadrement à distance individualisé. Les 200 tuteurs et tutrices ont développé une expertise particulière pour accompagner des étudiant-es, en grande partie de 1re génération, qui concilient travail/famille/études, et ce entièrement à distance.

Les enjeux de la « réorganisation du modèle d’encadrement » de la TÉLUQ

La création d’une nouvelle catégorie d’emploi reprenant le travail des tuteurs et des tutrices

La TÉLUQ se prive de l’expertise des tuteurs et des tutrices

La TÉLUQ met ses employé-es au rancart sans leur annoncer, par une réorganisation institutionnelle qui s’est décidée derrière des portes closes, en signant la nouvelle convention collective du Syndicat des professeures et professeurs de la Télé-université (SPPTU), sans consultation avec les autres groupes de l’université. Cette nouvelle convention, signée en mai, implique d’importantes mises à pied chez les tuteurs… mais ils ont appris ceci pour la 1re fois par un article dans Le Soleil en septembre dernier !

Il y a création d’une nouvelle catégorie d’emploi dans la convention collective d’une autre unité d’accréditation. Ces « professeurs sous contrat » sont distincts des professeurs réguliers, qui ont toujours existé, et qui s’occupent de recherche, service à la collectivité et développement des cours. Or, c’est un poste qui n’a de professeur que le nom :

̶ La tâche de cette nouvelle catégorie d’emploi est majoritairement une tâche d’encadrement, ce qui n’a jamais été conventionné comme tâche de prof depuis 40 ans ! Chaque poste reprend l’encadrement de plus d’étudiantes et d’étudiants par année qu’un tuteur ou une tutrice à temps plein ;

̶ Les critères de sélection sont ceux de tuteurs et tutrices, soit une maîtrise, plutôt que des critères de profs, un doctorat et des publications ;

̶ Ce sont des emplois contractuels, précaires, comme les tuteurs et les tutrices, plutôt que des postes permanents comme les professeurs.
Malgré cela, les nouvelles personnes embauchées vont reprendre le travail des tuteurs et des tutrices qui se dévouent à leur institution depuis 10, 20, 30 ans, simplement car l’université leur donne un autre titre, car ces nouveaux « professeurs sous contrat » ont alors priorité sur les tuteurs pour obtenir le travail d’encadrement ! Ceci signifie une perte importante d’expertise en formation à distance.

Une diminution du service aux étudiantes et aux étudiants

La durée et la tâche d’encadrement par les tuteurs est balisée par notre convention : 19 tâches et une moyenne de 3 h d’encadrement individuel par étudiant-e. Selon leur propre convention collective, les « professeurs sous contrat » ne doivent donner qu’une heure d’encadrement par étudiant-e. Les étudiant-es payent les mêmes frais de scolarité pour un service différent, ne serait-ce qu’en terme de durée. Les étudiant-es sont évalués selon les mêmes critères, peu importe s’ils ont 1 h ou 3 h d’encadrement pour les aider à progresser dans leur cours.

La TÉLUQ a recours à la sous-traitance

La privatisation de l’enseignement public

En septembre 2016, la TÉLUQ a décidé de sous-traiter l’enseignement de 4 programmes de langues à un soustraitant privé, l’Institut MATCI, mettant à pied 20 % des tuteurs et des tutrices. Le MATCI est une institution privée à but lucratif ne détenant aucun permis d’enseignement délivré par le ministère de l’Enseignement supérieur. Ce sont donc des employé-es d’un tiers qui sanctionnent la réussite de ces étudiant-es, qui obtiennent pourtant un diplôme de la TÉLUQ. Il est impossible de savoir de quelle façon le sous-traitant privé assure la qualité de l’encadrement et de l’évaluation des étudiantes et des étudiants de la TÉLUQ puisque l’entente reste secrète. Cela fait craindre pour la réputation de la TÉLUQ et la reconnaissance de ses diplômes. Désormais, en 2017-18, c’est 37 % de la population étudiante de la TÉLUQ qui sont ainsi encadrés en sous-traitance.

Un manque de transparence

Nos questions au Conseil d’administration (CA) de la TÉLUQ, notamment en termes de contrôle de la qualité effectué par ces employés externes, sont restées sans réponse. Nous avons transmis une lettre à tous ses administrateurs le 16 février, pour dénoncer le fait que l’entente entre la TÉLUQ et le MATCI reste secrète, et n’a jamais été approuvée par le CA. Pourtant, l’entente est un contrat qui implique le versement de redevances de 4 941 600 $ par la TÉLUQ à l’Institut MATCI, et le règlement de Régie interne de la TÉLUQ prévoit spécifiquement que le CA doit approuver les ententes de partenariat ayant une incidence financière de plus de 500 000 $. Ainsi, la Direction de la TÉLUQ pourrait enfreindre les règlements de son propre CA pour sous-traiter l’encadrement des étudiant-es à un partenaire privé.

L’état de la négociation

Les négociations ont été enclenchées en juillet dernier et se déroulent en présence d’une conciliatrice du ministère du Travail. À la table de négociation, en décembre, l’employeur a annoncé que 75 % des tâches des tuteurs et des tutrices serait désormais effectué par d’autres employé-es, et ce total n’inclut même pas les étudiant-es encadrés en sous-traitance. Après sept mois de négo, l’employeur n’a pas encore tout dévoilé son 1er dépôt patronal.

Les tuteurs et les tutrices ont manifesté en décembre pour dénoncer la lenteur des négociations et ces mises à pied. En assemblée générale en janvier, ils se sont dotés d’un mandat de moyens de pression incluant la grève, et celui-ci a été adopté à 100 % ! Pour tenter de dénouer la situation, la FNEEQ a demandé une rencontre politique avec le Directeur général de la TÉLUQ, que ce dernier a décliné, en raison de la présence de la présidente du syndicat lors de cette rencontre.

La TÉLUQ prend la voie de l’intimidation juridique plutôt que de la négociation. Le syndicat a reçu trois mises en demeure depuis deux mois ainsi qu’une poursuite de 80 000 $ adressée à la FNEEQ, au Conseil central Québec– Chaudière-Appalaches et au STTTU. Cette poursuite nous reproche en outre d’utiliser les termes « enseignants » et « mises à pied » pour décrire notre lutte aux médias.

Le STTTU est désormais à l’étape de faire savoir à la communauté universitaire et collégiale, au réseau de l’UQ et à la ministre de l’Enseignement supérieur les dérives appréhendées de cette perte d’expertise en formation à distance et diminution du service aux étudiantes et aux étudiants, notamment dans le contexte de la mise en place du eCampus.

FÉDÉRATION NATIONALE DES ENSEIGNANTES ET DES ENSEIGNANTS DU QUÉBEC 1601, avenue de Lorimier, Montréal (Québec) H2K 4M5 Téléphone : 514 598-2241 / Sans frais : 1 877 312-2241 3 / Télécopieur : 514 598-2190 [email protected] / www.fneeq.qc.ca www.facebook.com/fneeqcsn / www.twitter.com/fneeqcsn

[email protected] http://stttu.ca https://fr-ca.facebook.com/stttu.ca

(mis à jour : 22 février 2018)